En Tunisie, la civilisation romaine a laissé beaucoup de traces. Parmi les nombreuses constructions antiques persistantes de nos jours, certaines sont encore fonctionnelles. L’une des plus intéressantes est l’aqueduc ZaghouanCarthage, permettant l’adduction d’eau du Temple des Eaux de Zaghouan vers les Termes d’Antonin à Carthage.

Partons à la découverte de cet ouvrage rénové récemment.

La principale source captée est localisée à Zaghouan, notre visite débute donc dans cette ville.


Venir à Zaghouan

  • En voiture : depuis Tunis, prendre la route de Zaghouan, tout simplement (c’est indiqué dès la sortie de Tunis en direction d’Hammamet). Compter environ 1h de route.
    Il est également possible de venir depuis Hammamet et Nabeul, en 1h.
  • En louage : depuis Tunis, prendre le louage à la gare de Bab Alioua. Des rotations partent également d’Hammamet et Nabeul. Ces trajets durent environ 1h.

Accès au Temple des Eaux

Dans Zaghouan, suivre les panneaux “Temple des Eaux”, depuis le rond-point du Magasin Général. Il y a environ 2 km, faisables à pied ou en voiture. La route grimpe au-dessus de la ville, en passant devant la Garde Nationale puis devant le siège du gouvernorat. Après quelques zig-zag au milieu des cyprès, on arrive au niveau du Temple des Eaux.

Village de Zaghouan, au pied du djebel Zaghouan
Le Djebel Zaghouan, surplombant la ville

La source

Connue depuis toujours, cette source (aïn en arabe) sort par une faille au niveau du Temple des Eaux. La présence de cette source importante est liée à la nature du massif de Zaghouan (1295 m).

En effet, le massif s’élève au dessus des plaines environnantes. Les nuages s’accrochent facilement aux pentes, les pluies sont donc relativement importantes sur les flancs du Djebel.

Nuage accroché au djebel Zaghouan
Un nuage sur le Djebel

L’autre particularité du massif est sa géologie : il est composé de calcaires datés du jurassique. Sous l’action de l’eau, ces roches se dissolvent et forment un véritable gruyère souterrain. Ainsi, de nombreux gouffres existent dans le djebel et sont explorés par les spéléologues. L’eau s’y infiltre et ressort au niveau de quelques points stratégiques.

Dans le cas du Temple des Eaux, une faille permet de drainer les eaux et crée la source. Les spéléologues des clubs de Zaghouan s’activent dans ce secteur dans l’espoir de trouver un accès à un réseau actif, sans succès pour le moment…

La source est toujours visible au niveau du Temple des Eaux. L’eau se situe environ 17m sous la plaque protégeant l’accès aux galeries de captage.

Plaque protégeant le captage de la source principale du Templs des Eaux
Plaque protégeant l’accès à la source

Le Temple des Eaux

Cette source est donc captée depuis l’an 130 après JC environ. C’est l’empereur Hadrien qui lança les travaux de construction et édifia un Temple au niveau de la source principale.

Le Temple des Eaux : aménagement antiques de la source alimentant Carthage
Le Temple des Eaux, lieu de visite apprécié par les tunisois et tunisiens

Cet espace a fait l’objet d’un programme de restauration ces dernières années, sa visite est ainsi devenue intéressante. Le Grand Temple possède en effet une architecture très bien conservée, il ne manque que les statues qui ornaient les portiques, actuellement exposées au Musée du Bardo.

D’autres structures sont encore presque intactes, comme le Petit Temple (probablement destiné à l’alimentation en eau de Ziqua, l’ancêtre de Zaghouan) et le Grand Bassin.

Le petit temple de Zaghouan
Le Petit Temple
Grand Bassin où étaient récoltées les eaux du Temple des Eaux
Le Grand Bassin

L’aqueduc Zaghouan – Carthage

Dès sa construction, le captage de la source était destiné à l’alimentation en eau de Carthage. Il a donc fallu acheminer les eaux vers la ville. Ainsi, des travaux colossaux ont été entrepris. En partant du Temple des Eaux voici quelques données de l’aqueduc Zaghouan – Carthage :

  • un total de 132 km de réseau, tantôt aérien (aqueduc), tantôt souterrain
  • deux ramifications : une venant de Zaghouan, l’autre venant d’Aïn Jouggar, plus au sud
  • quatre sources captées : deux à Zaghouan, deux à Aïn Jouggar
  • un débit estimé à 30 000m3/jour
  • réalisé au IIème, réutilisé aux Xème, XIIIème et XIXème siècle. Certaines portions sont encore utilisées de nos jours

La branche provenant de Zaghouan

L’ouvrage est visible en de nombreux endroits dans la région. Ainsi, dès le Temple des Eaux, on remarque très facilement le départ de l’aqueduc et son tracé dans la plaine.

Aqueduc Zaghouan - Carthage : le départ de l'aqueduc, au niveau du Temple des Eaux
Les premiers mètres de l’aqueduc au Temple des Eaux
Cheminement de l'aqueduc Zaghouan - Carthage
L’aqueduc traverse la plaine de Zaghouan, en direction du djebel Oust

La branche provenant de Bent Saïdane

En se baladant dans la région, on pourra tomber sur des vestiges du complexe hydraulique. Par exemple, au niveau du village de Bent Saïdane, la ramification venant d’Aïn Jouggar traverse l’oued Gouissate. Ici, un bel aqueduc a été construit pour franchir la vallée.
Aucune indication ne signale cet ouvrage : la surprise est totale au détour d’une piste…

L'aqueduc de Bent Saïdane
L’aqueduc de Bent Saïdane

L’état de conservation de cet aqueduc est impressionnant; il est intéressant d’observer son architecture. En effet, chaque partie des arches est réalisée avec une roche spécifique : les piliers sont en calcaire, compact et résistant, alors que la partie supérieure est en marne, plutôt imperméable dans le but de diminuer les fuites. Par ailleurs, on trouve de nombreux fossiles dans ces matériaux, comme cet oursin :

Fossile d'oursin à la base de l'aqueduc
Fossile d’oursin à la base de l’aqueduc

Le cheminement vers Carthage

Enfin, vous longerez sur plusieurs kilomètres l’aqueduc sur la route qui relie Zaghouan à Tunis.
Les arcades sont spectaculaires notamment entre Oudhna (site archéologique très intéressant dont je vous conseille la visite lors du retour vers Tunis) et Mohammedia, suspendues à une vingtaine de mètres au dessus de la route.

Les immenses arches de l'aqueduc Zaghouan - Carthage, au niveau de Oudhna
L’aqueduc au niveau d’Oudhna

De nombreux vestiges sont visibles à Tunis (Bab Saadoun) et à Carthage, bien entendu. Les eaux étaient récoltées dans les immenses citernes de la Maalga et permettaient l’alimentation des Thermes d’Antonin (nous en parlons dans l’article consacré au site archéologique de Carthage).

Enfin, l’ensemble du complexe hydraulique, le Temple des Eaux et l’aqueduc Zaghouan – Carthage, figurent depuis février 2012 dans la liste indicative des sites exceptionnels proposée par la Tunisie auprès de l’UNESCO.


Quelques infos pratiques complémentaires

Zaghouan est une excellente base arrière pour découvrir la région :

  • Le djebel Zaghouan est idéal pour pratiquer les activités de montagne comme l’escalade, la spéléologie, le canyon, le VTT… Pour plus d’informations, je vous conseille de contacter mes amis de l’Association Escalade Spéléologie de Zaghouan (Site web, page Facebook)
  • De nombreuses randonnées sont possibles sur le djebel, nous en présentons quelques-unes sur le site (Pic Zaghouan par Bougabrine, par Sidi Mediene, le Col Vert…)
  • Plusieurs sites archéologiques intéressants se trouvent à proximité : Oudhna et Thuburbo Majus par exemple.
  • N’hésitez pas également faire la visite du centre ville de Zaghouan, à chercher les multiples fontaines par exemple. Profitez-en faire une pause dans une pâtisserie et repartir avec quelques kaak warka, succulents 🙂

Bonne visite !


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